CAN 2015 : « Le foot-ball est une affaire d’Etat, les Tunisiens doivent dépasser l’émotionnel », déclare Abdou Belgat .

Ancien Ambassadeur du Groupe Accor et Directeur en charge des projets spéciaux Afrique-Moyen-Orient, Abdou Belgat est aujourd’hui président-fondateur de B.C.Consulting (cabinet d’audit et d’expertise)., il est également le vice-président de l’Association Francophone des Experts et Scientifiques du Tourisme(AFEST) et l’un des premiers responsables de l’Association Mondiale pour la Formation Touristique et Hôtelière(AMFTH). Passionné de football, pour avoir œuvré durant des années au sein du Groupe Darmon, Leader européen de la communication par le sport, il est reconnu comme un expert du football notamment du foot africain et des coulisses de la CAF. Ce qui nous a incité à l’approcher pour sonder son point de vue à propos de la mésaventure du team national face à la Guiné-Equatoriale, pays organisateur de la CAN 2015.

Avec son humilité habituelle, il a bien voulu répondre à nos questions.

Leskoop : comment expliquer la persistance de l’arbitrage-maison en Afrique ?

Abdou Belgat :
C’est impératif,l’arbitrage du foot africain doit s’améliorer.Que l’on puisse, me semble-t-il, soutenir la Guinée-Equatoriale, pays hôte de la CAN 2015, à aller de l’avant dans la compétition continentale ne peut surprendre personne et tous les analystes sportifs étaient conscients des nouveaux rapports de force, inhérents au désistement du Maroc et au choix final de Malabo. Mais c’est aux autres nations du foot-ball, qui n’ont pas le droit à la naïveté, d’en tenir compte et d’intégrer cette donne politique, économique et sociale dans leurs schémas tactiques et stratégiques durant des matchs décisifs, passionnels, où l’ego national est souvent en jeu.

Bien entendu, tout en appelant au réalisme et à la retenue, le respect de l’éthique sportive recommande la dénonciation de la prestation de l’arbitre du match Tunisie-Guinée-Equatoriale et le début du nettoyage des écuries d’Augias de la CAF.

Leskoop : Quelles sont les failles du team national tunisien ?

Abdou Belgat :
Indéniablement les failles sont d’ordre mental. Le staff tunisien et les joueurs étaient en principe édifiés sur l’environnement hostile entourant le quart de finale, ce qui aurait dû pousser à la concentration sur le terrain, loin des provocations des uns et des autres.

En fait, la Guinée-Equatoriale, une équipe aux compétences limitées, de tout temps à l’arrière garde du foot africain, était à la portée des poulains de Georges Leekens, qui auraient dû forcer le destin, retenir la leçon du Gabon, saisir l’opportunité des prolongations, surmonter leur handicap et faire le bonheur de leurs « tifosi ».

Il m’est donc difficile de comprendre la faillite mentale des joueurs tunisiens, habitués pourtant aux joutes africaines. Le professionnalisme recommande de coller à la réalité du terrain et d’éviter de céder aux sirènes périphériques d’essence provocatrice.

Leskoop : Et la CAF dans cet imbroglio ?

Abdou Belgat :
Le rôle de la CAF, organisateur exclusif des compétitions continentales (CAN, League des champions..), est de contribuer au rayonnement du fooot en Afrique et non pas de léser ou d’humilier les grandes nations de ce sport roi.

Infliger des amendes à des fédérations, cela ne me surprend pas.Mais exiger des excuses solennelles risquent d’entamer le crédit de la CAF, déjà largement entamé en raison des soupçons de corruption, qui pèsent depuis longtemps sur cette grande institution du fooot-ball africain. Le jury disciplinaire fait fausse route dans ce dossier.

Finalement, dans cette sombre histoire, la CAF, qui doit revoir sa copie et revisiter ses fonctionnements internes, s’est penchée sur les conséquences du match et non pas sur ses causes. A savoir la piètre prestation arbitrale.

Leskoop : Quel message pour la CAF face à ces scandales à répétition ?

Abdou Belgat :
le président Issa Ayatou et sa garde rapprochée sont dans l’obligation de traiter autrement les nations du foot roi, loin des diktats, des menaces et des sermons. Il y va de l’avenir et de la crédibilité d’une Institution, qui a tant fait pour le sport africain.

Cela dit, le patron de la CAF, que je connaîs très bien, saura traiter, j’en suis convaincu, ce dossier brûlant, apaiser les esprits et sauvegarder la notoriété de la confédération.

Leskoop : quels conseils pour la fédération tunisienne ?

Abdou Belgat :
Pas de conseils. Je ne suis pas habilité à en donner. Mais la fédération tunisienne de foot-ball doit tirer les leçons necessaires de cette déconvenue. La CAF, de son côté, doit savoir qu’il est hors de question de traiter de grandes nations du football en exigeant des excuses publiques. La sagesse et le savoir-faire doivent prévaloir. La pérrenité du sport africain est à ce prix.
j’espère que ce message sera entendu.

Leskoop:Quel pronostic pour la finale?

Abdou Belgat: Tout d’abord, La Guinée-Equatoriale et la CAF ont eu le mérite d’organiser en un temps record cette compétition reine du continent africain.
La finale Ghana-Côte D’Ivoire est une très belle affiche et les deux équipes ont les mêmes chances de l’emporter.Mais cela aurait pu être aussi Tunisie-Algérie.

Propos recueillis par Imededdine Boulaâba

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